Focus sur l’arrêt du Conseil d’Etat, 1ère et 4e chambres réunies, du 20 juin 2022, n°441707, mentionné aux tables

Le Conseil d’Etat précise les conditions d’autosaisine de la Commission nationale d’aménagement commercial

Focus sur l’arrêt du Conseil d’Etat, 1ère et 4e chambres réunies, du 20 juin 2022, n°441707, mentionné aux tables.

Le pouvoir d’autosaisine de la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) est tiré de l’article L752-17 du code de commerce.

A titre de rappel, celui-ci dispose que la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) doit informer la CNAC, dès le dépôt, de tout projet mentionné à l’article L752-1 du code de commerce :

  • dont la surface de vente atteint au moins 20.000 m2 (III de l’article L752-1 du code de commerce),
  • dont la surface de vente est supérieure à 20.000 m2 ou qui a déjà atteint le seuil de 20.000 m2 ou qui doit le dépasser par la réalisation du projet (IV de l’article L752-1 du code de commerce).

Le V de l’article L752-17 du code de commerce prévoit que la CNAC peut se saisir de tout projet mentionné à l’article L752-1 dont la surface de vente atteint au moins 20.000 m2 . Son avis (ou sa décision, selon qu’un permis de construire est ou non nécessaire) se substituera à celui de la CDAC.

Qu’est-ce que l’autosaisine ?

L’autosaisine permet à la CNAC de soumettre à son contrôle les projets de création ou d’extension portant sur des surfaces de vente supérieures à 20.000 m² qui auraient été autorisés par une CDAC, en l’absence de tout recours exercé par un tiers.

Selon le rapport d’activité 2020 de la CNAC, seul un projet à fait l’objet d’une autosaisine sur un total de 187 dossiers de demande d’autorisation examinés. Autant dire que la procédure d’autosaisine est rarement mise en œuvre. Cela a pourtant été l’occasion pour le Conseil d’Etat de préciser la portée des dispositions du code de commerce sur cette faculté.

Faits et procédure 

La société LAURY-CHALONGES DIS a saisi la CDAC de LOIRE-ATLANTIQUE d’une demande d’autorisation d’exploitation commerciale afin de procéder à l’extension de la surface de vente pour 1.450 m2 d’un magasin d’une surface de vente initiale de 800 m2. Ce magasin est situé dans un ensemble commercial d’une surface de vente totale de 40.630 m2. La CDAC a accordé l’autorisation sollicitée.

La CNAC s’est autosaisie du projet et le 20 décembre 2018, elle a refusé d’accorder l’autorisation d’extension, son avis défavorable se substituant à celui de la CDAC de LOIRE-ATLANTIQUE.

Le pétitionnaire a évidemment contesté cet avis défavorable devant la Cour administrative d’appel de NANTES qui, par un arrêt du 13 mai 2020, a annulé l’avis de la CNAC refusant l’autorisation d’extension.

Le Ministre de l’économie, des finances et de la relance et la CNAC se sont pourvu en cassation devant le Conseil d’Etat.

Il revenait donc aux juges du Palais Royal de préciser si la faculté d’autosaisine peut être mis en œuvre uniquement lorsque le projet soumis à autorisation présente en lui-même une surface de vente supérieure ou égale à 20.000 m2, , ou également lorsque le projet, porte sur un commerce ou un ensemble commercial ayant déjà atteint ce seuil ou devant le franchir, dès le premier mètre carré supplémentaire demandé ?

Les conditions de l’autosaisine sont précisées

Le Conseil d’Etat a opté pour la seconde interprétation et a annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel de NANTES du 13 mai 2020 (n°19NT00846).

Il a estimé qu’au regard des « dispositions combinées des III, IV et V de l’article L752-17 du code de commerce, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises dont elles sont issues, que le législateur a entendu, en prévoyant que la Commission nationale d’aménagement commercial est systématiquement informée des projets dont la surface de vente est supérieure ou égale à 20 000 mètres carrés et ceux ayant déjà atteint ce seuil ou devant le dépasser par la réalisation du projet que la Commission nationale puisse s’autosaisir de l’ensemble de ces projets, et non seulement de ceux dont la surface de vente devant être autorisée est supérieure ou égale à 20 000 m2. »

Il ressort ainsi très clairement de cette décision que la CNAC peut s’autosaisir :

  • Des projets objets d’une demande d’autorisation, dont la surface de vente demandée est supérieure ou égale à 20.000 m2,
  • Des projets d’extension de commerces ou d’ensembles commerciaux présentant déjà une surface de vente supérieure ou égale à 20.000 m2,
  • Des projets d’extension pour lesquels le seuil de 20.000 m2 sera atteint ou dépassé en cas d’autorisation.

Ce faisant, le Conseil d’Etat se rapproche de la volonté du législateur en renforçant le contrôle de l’administration sur les très grandes surfaces commerciales.

Les acteurs du commerce et de la construction devront donc être vigilants dans la conception de tels projets, de sorte à respecter scrupuleusement les critères d’octroi des autorisations d’exploitation commerciales.

Rédigé par Audrey KHAIRALLAH et Gwenaël LE FOULER



error: Ce contenu est protégé